Mission 2015 à Tbilissi (Récit de Jean Hue)
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MISSION CULINAIRE A TBILISSY (Juillet août 2015)
Jean HUE, membre d'AGIR Réunion, ancien Chef cuisinier, missionné par le siège d'AGIR abcd pour aller former des charcutiers-traiteurs dans une entreprise nouvellement créée à Tbilissi, Capitale du SAKARTVELO, état plus connu sous le nom de Géorgie, nous fait le récit de son voyage, de son séjour, de sa mission avec ses déboires et ses déconvenues, mais aussi du formidable travail accompli en un temps record avec son collègue Louis venu à la rescousse, auprès de personnels ayant tout (ou presque tout) à apprendre.
Arrivée en Géorgie, pays de moins de 4 millions d’âmes avec pour Capitale Tbilissi pour un séjour du 6 juin au 31 Août 2015, à la demande d’un Traiteur-Charcutier, sous un début d’été chaud, continental, à caractère le plus souvent orageux !
Chacun a entendu sur les ondes via internet ou à la TV, parler de ce gros orage dans la nuit du 12 au 13 juin, au cours duquel une partie de la ville basse fut inondée, de nombreuses maisons envahies par les eaux de la Mtkvari, ainsi que le Zoo proche de ses berges, dont un grand nombre d’animaux se sont échappés ; un tigre blanc fut abattu après avoir tué un passant ! L’image que vous avez peut-être retenue est celle de cet hippopotame dans la boue ! Qu’en dire ? Le marigot c’est son univers, et ce photographe aurait pu choisir un autre sujet ! Ah les infos à chaud !.... Dans la partie de la ville où je suis, je n’ai rien ressenti, et la seule conséquence a été l’interdiction de sortir de nuit durant 48h, avant de retrouver les « évadés ». Evidement il ya eu des sinistrés, on grossit souvent l’Info...
Voyage de 24h : une première escale à Maurice, puis direction Dubaï en A380 avec Emirats Airlines ; de là attente de 10h dans le hall d’un des 3 Hubs dédié au duty free par excellence, puis vol vers Tbilissi en survolant les monts enneigés du nord de l’Iran et d’Arménie. Il était 14h30 HL lors de l’atterrissage. Chose que vous verrez rarement dans le reste du monde : à votre arrivée en Géorgie, lors de votre passage à la police des frontières (la P.A.F), vous avez droit à un grand sourire et on vous tend une bouteille de vin en guise de bienvenue ! Pas mal non ?
Bon accueil de la part de Nini Lomidze, l’interprète faisant partie de l’entreprise manager de production, ayant vécu comme étudiante en France, avec d’autres fonctions au sein du groupe, rattachée à cette entreprise en particulier, elle m’a été d’un grand secours, compréhensive, à l’écoute malgré la barrière de la langue, présente à chaque instant. Le Géorgien… indéchiffrable, Ouah !
Parfaitement installé dans un appartement fonctionnel avec ce qu’il faut : une télévision qui ne « télévise » pas toujours et installé voici quelques jours seulement (début Juillet) internet dont on ne peut que difficilement se passer.
La bureaucratie d’un état neuf, à caractère Soviétique n’est pas sans poser des difficultés. Je suis donc logé juste au-dessus du lieu où sera dispensée la formation demandée.
(Vue générale de Tbilissi, une belle capitale)
Une architecture d’un mélange extraordinaire, mariant l’ancien et moderne, dans une bonne harmonie. Ville encaissée dans la vallée de la Mtkvari, un métro est là pour la desservir, très profond avec des escalators interminables et pentus.
Un funiculaire pour se rendre au point de vue dominant la vallée, la Tour Eiffel Géorgienne et sa grande roue, le parc Mtatsminada, avec son restaurant panoramique d’où la vue est splendide. Egalement un téléphérique pour se rendre au château Narikala proche d’une immense statue de la Mère de la Géorgie, Mother of Kart li.
Des églises Orthodoxes partout, plus belles les unes que les autres, surtout les intérieurs surchargés de dorures ; le Pope qui est là à bénir, la croix orthodoxe d’une main l’encensoir de l’autre, avec un habit lourd et cette barbe oh combien utile pour ces religieux d’une dévotion incroyable ; des icônes mille fois embrassées, la magnifique Cathédrale Sainte Trinity Church, une église ou plus dans chaque quartier ainsi que quelques Synagogues… Tout croyant se signe de nombreuses fois même en étant sur le trottoir en face en passant devant un lieu de culte.
Des chauffeurs de taxi en nombre incroyable, dans de belles Mercédès ou dans d’autres hors d’âge le volant tenu d’une seule main, l’autre étant sur le portable ou la cannette de bière tout le temps de la course.
Je ne peux que vous recommander un séjour dans cette ville pleine de charme C’est facile surtout en venant de France : un saut de puce via Istanbul ; de la Réunion la puce est plus grosse !...
Barrière de la langue tout comme de l’écriture, incompréhensible, indéchiffrable pour un latin ; de plus l’anglais étant peu compris j’ai eu du mal avec le Russe!
La langue Caucasienne possède son propre alphabet de 33 lettres dont seulement 5 voyelles, mais il fait partie des quelques alphabets écrits au monde.
Donc il faut être un peu « baroudeur » pour se balader, avec un sens de l’orientation, inné chez moi et qui surprend souvent, mais cette ville que je ne connais pas, me semble rapidement familière. Certains savent que rien ne m’arrête, je n’ai que très rarement demandé mon chemin, mon GPS perso fonctionne encore très bien.
Pays indépendant depuis Avril 1991 seulement, avec des conflits très récents qui perdurent avec la Russie au Nord qui grignote les provinces limitrophes bien évidement.
Au sud-est la Turquie, l’Arménie et l’Azerbaïdjan, et Téhéran à 900 km.
Ce pays est le véritable berceau de la vigne, titre que la Grèce s’est appropriée.
Le drapeau Géorgien est une croix de St Georges rouge sur fond blanc, flanquée de 4 petites croix rouges ; il a été adopté en 2004 lors de la Révolution des Roses.
Certainement que la suite de mon récit, vécu, ne sera pas perçu de la même façon pour nos adhérents venant du monde de l’enseignement que celui du retraité venant de la transmission manuel qu’est le boulanger, le cuisinier, le boucher, le Charcutier, le Traiteur, les métiers du Bois, du cuir, de la peinture, etc.
Lorsque nous intervenons nous devons nous mettre dans le « bain » nous fondre dans l’entreprise qui nous accueil, suivre ses horaires, qui ne sont pas ceux du monde enseignant.
Alors nous réalisons des heures, la passion nous « emporte » nous nous retrouvons 20 ou 30 ans en arrière à œuvrer avec des « p’tit jeunes ». La transmission c’est ça : être là, avoir un savoir-faire à inculquer, un savoir-être à faire passer. Malgré l’horloge qui tourne, les heures qui défilent ce n’est que du bonheur bien qu’on ait mal partout, surtout aux jambes avec nos positions debout, en oubliant le plus souvent d’aller nous balader, visiter, prendre du temps libre quoi.
Merci de nous comprendre, nous les actifs qui sommes là pour vos papilles, pour pérenniser l’artisanat, la Gastronomie à la Française, l’art du bien vivre, du bien se restaurer propre à notre pays de France, art qui peut se perdre si nous n’œuvrons pas en conséquence. Nous sommes les Ambassadeurs oh combien reconnus ou nous passons !....
Ce fut encore cette fois le mot employé par Monsieur l’Ambassadeur de France en place actuellement à Tbilissi, lors de sa visite après l’invitation dont il nous a honorés au traditionnel 14 Juillet « Nous sommes les Ambassadeurs d’un savoir-faire…. » Nos passages reste de grands moments d’échanges culturels et cultuels, les départs sont toujours pleins d’émotions, on a donné et reçu tellement en retour, que pour finir je suis un apprenti retraité, en nouvel apprentissage, pas toujours sage…..
Ici la Direction et Jean bien entourés Là avec une partie du personnel formé, dans un beau point de vente.
L’entreprise ou j’étais en mission pendant ces 3 mois, est située en proche banlieue de Tbilissi dans une avenue très passante, Tsereteli avenue, comparable à un Grand Boulevard Parisien ombragé par des platanes monumentaux possédant de larges trottoirs et avec une circulation dense de jour comme de nuit,
Cette Boucherie-Charcuterie-Traiteur ouverte depuis février de cette année est une pionnière en Géorgie. C’est en effet la toute première fois que s’implante un tel commerce. Cela surprend en 2015 !
Le marché traditionnel est comme partout dans les pays en voie de développement : on découpe à la hache habillé en polo maculé de sang ne datant pas du jour. Le tablier est inexistant, aucune hygiène. La viande est posée sur un bout de carton ou tronc d’arbre « bois de bout » servant de billot hors d’âge. Comme c’est l’été, les mouches ont élus domicile sur la viande ou l’une se noie dans un jus de tripes ou de pieds de bœuf en attente d’un chaland.
Le point de vente et le lieu de travail
Rassurez-vous ce n’est surtout pas le cas dans cette entreprise qui est tellement « nouvelle » que presque chaque semaine elle reçoit la visite du contrôle d’hygiène sanitaire. « Vous êtes des référents pour toute la Géorgie donc un bel outil pour nous, qui nous permet de comparer avec ce qui se fait ailleurs, ou bien entendu nous sommes démunis pour faire changer les mentalités ancestrale… » m’ont-ils dit.
Les expatriés sont de bons clients, tout comme les Ambassades, ou même le Géorgien qui a voyagé et qui a un pouvoir d’achat en haut de l’échelle. Tous sont avides de produits leurs rappelant notre culture et notre savoir-faire gastronomique incomparable dans le monde.
Dans l’entreprise tout est à faire ; depuis le personnel de vente, jusqu’au laboratoire, les personnels ne connaissent rien ! Curieux constat mais il faut reconnaitre que l’ouverture a été plus ou moins ratée car faite avec des personnes qui n’avaient pas les compétences requises, ou qui on été vite débordées.
Tout est donc à reconstruire, tâche ardue à laquelle je me suis attelé, en ne comptant pas mon temps d’intervention au détriment de visite que j’aurais pu faire dans cette belle ville et ses environs ; je savais dés le premier jour (l’œil est encore là) que cette mission serait difficile mais…pas à ce point. Ceux qui ont fait l’ouverture en Février ont pris peur me semble-t-il, lorsqu’ils ont vu le travail que je leur demandais, après une journée passée à faire mon bilan. Sur l’attitude à mettre en place et plan qu’il me semblait bon d’adopter, naturellement d’un commun accord avec la Direction.
Sachant que lorsque nous intervenons c’est qu’il y a généralement un souci, les employés ont déserté en se concertant ; le lendemain de mon arrivée, abandon de poste ! Plus personne ! Il a fallu embaucher quatre nouveaux personnels après de nombreux entretiens, essais, explications sur ce qu’était le métier, ce que l’on attendait de leur part. Certes je n’aurai peut-être pas dû m’investir autant suite à cette « mutinerie » et simplement exprimer le souhait de revenir lorsqu’il y aurait du personnel à former et tout simplement rentrer chez moi et attendre. Mais, étant un professionnel responsable j’ai agis à ma façon, et cela « payé » me semble-t-il.
Il semble que personne n’ait de véritable formation agro-alimentaire en Géorgie ; tout est à faire. J’agis donc comme si c’était ma propre entreprise, et on me donne carte blanche. « Proposez, on suit, allez-y Chef Jean ! ». Sauf que les conseils donnés aux dirigeants, manager, directeur, responsables, ne sont perçus que d’une oreille, ce que je peux comprendre facilement car tous sortent juste d’un régime apparatchik à la Soviétique. La guerre civil était encore là en 2008. On passe son temps à contrôler à peser à repeser à sur peser absolument tout ! J’ai le sentiment qu’un Directeur -ici c’est une Directrice que nous avons-, est uniquement là pour un salaire alimentaire, sans les compétences requises, juste pour contrôler ce qui à été écrit cinq fois sur des cahiers successifs, recopier la copie sur un graphique informatique. Pensez-donc, des fois qu’il manquerait 2 gr !
Personne ne sait désosser un morceau de viande qu’il soit de bœuf ou de porc, ni que faire une fois l’os retiré et viande triée. On commence donc la formation comme pour des apprentis 1ére année : La première semaine, comment tenir un couteau, l’aiguiser, apprendre l’anatomie des animaux, distingué ce qui est destiné aux transformations, de ce qu’est la « partie noble » destinée à la vente en produit cru et frais, éplucher un oignon, trier du persil, une carotte, scier un os, ficeler un rôti, reconnaitre une viande tendre d’une plus ferme, sa cuisson, son conditionnement etc…
Demande en urgence à l’un des dirigeant mais aussi investisseur de nationalité Suisse Mr Blauestein, qui lui à bien compris mon message et l’urgence qu’il y avait à réagir très vite. Cela a été mené de mains de maitre grâce à Mme Bornecque notre correspondante AGIR de cette mission, qui a vite trouvé l’homme qu’il nous fallait (car moi Jean Hue, je ne suis pas Boucher), et disponible pour un mois. Merci Claude!
Je suis donc secondé dès la fin de la première semaine de Juillet, par un Boucher de notre association Louis Devreton, excellent professionnel bon pédagogue, mais peut-être un peu trop sélectif dans son approche du métier, car ne connaissant que la viande de bœuf et rien d’autre ! Dans une entreprise comme celle-ci il faut de la polyvalence, toucher à tout.Toutefois s’il n’était pas venu à mon secours je crois que je quittais cette mission trop prenante, usante, car j’étais peu compris, peu écouté. Avec un peu de recul je comprends leurs réticences car je sais d’où ils sortent et j’ai réalisé que j’étais dans un pays tout neuf. Habituellement j’interviens pour des demandeurs qui possèdent des acquis et souhaitent simplement progresser dans le savoir-faire à la Française. De ce fait, j’ai pu enfin prendre un « apprenant » sous ma coupe, lui enseigner les bases du métier qui ne resteront que des bases pour le temps de mon intervention. Métier au combien pointu qu’est la transformation Traiteur-Charcutier. J’ai tout créé de A à Z en essayant de former. Ce qu’il en restera, c’est bien là mon inquiétude ! Si ce n’est que pour passer, cela m’affectera quelque peu, car j’aime transmettre, mais encore faut-il qu’en face il y est de la réceptivité, de l’envie d’apprendre, de l’amour du métier, de l’envie de se faire une carrière. Ici l’objectif est plutôt d’avoir un salaire que l’on vient chercher, car le chômage est là aussi bien présent et les salaires sont bas.
Pour vous donner une idée de ce qui a été fabriqué uniquement en produits transformés, en voici la liste assez exhaustive :
Belle gamme de saucisses (de dix sortes), saucisson à l’ail, sec, saucisse sèche, chorizo, cervelas, salami, rillons, jambon blanc, jambon d’York, de Bourgogne, jambon de bœuf, poitrine fumée, noix de Savoie, bacon, divers blitz, pâté de campagne, de foie, persillé, fromage de Tête, museau, rillettes, pâté en croûte, galantine, tripes à la mode, etc…
Le 13 Juillet visite de Maka Bediashvili, la correspondante d’AGIR Géorgie à qui nous avons exposé la situation du moment afin que cela serve à l’avenir, s’il y a d’autres intervenants à notre suite. Il faudrait qu’ils sachent ce qu’il l’attend. Il me semble que le message a bien été transmis. Si le démarrage a été ardu la suite fut plus « coulante ». Ils souhaitent tout de même apprendre et même en partant de rien, nous sommes arrivés à un résultat. Pas facile lorsque qu’on est dans un point de vente en activité. Heureusement la clientèle est compréhensive mais elle est trop contente d’avoir enfin un magasin qui propose à la vente des produits jusqu’ici introuvables en Géorgie. De plus ce magasin est spacieux, bien agencé, réalisé dans les normes Suisse, avec un matériel haut de gamme qui pourra supporter une production conséquente dans l’avenir.
Les personnels tout sourire
14 juillet à l'Amabassase de France
Le jour du 14 Juillet nous n’avons travaillé que le matin afin d’être présents à la réception donnée par l’Ambassadeur dans les jardins du parc April Garden, proche du centre ville, Liberty square. Belle réception très courue par le monde Diplomatique, les ressortissants Français, et autres institutions car il n’y a que la France et l’Ambassade Américaine qui organise ce genre de garden-party.
M. l’Ambassadeur de France àTbilissi, ainsi que les deux ambassadeurs d'AGIR abcd Louis et Jean
Ce qui est important dans la vie c’est d’être utile. Apprendre un métier manuel ne doit pas être un choix par défaut car c’est plutôt une chance de pouvoir devenir le « capitaine » de son entreprise, fondée de ses mains, ou d’y avoir des responsabilités et d’y fournir un travail et des résultats à la hauteur des attentes et, si possible au-delà.
Je n’ai pas abordé la partie Traiteur qui devrait suivre dans le temps. Il sera facile, par la suite de proposer par exemple des tomates farcies en saison, une paëlla, une quiche lorraine, un couscous, une potée, des plats cuisinés, des verrines, un gratin, des friands etc. Tout ce qui est proposé se vend.
Le séjour de Louis Devreton s’est terminé le 05 Août, il a fait de son mieux pour « dégrossir » en souhaitant que le gestuel restera acquis un minimum chez ce personnel débutant. Le constat de Louis sera identique au mien et un peu déprimant car nous avons eu la même impression que les acquis ne sont qu’éphémères.
Des apprenants « têtus », c’est presque habituel lorsque nous avons en face de nous des adultes au caractère affirmé, où la barrière de la langue vient encore ajouter des difficultés..
Nous ne sommes que peu écoutés ou peu compris et ceci pèse sur notre attitude, car même en faisant des efforts, nous n’avons plus trente ans mais le double !
Nous, intervenants qui œuvrons en milieu difficile, dans des terres inconnues, nous partons très souvent la fleur au fusil. Prendre un avion est toujours une aventure mais à l’arrivée, la réalité est tout autre sur le terrain et, avec notre façon de vivre à l’Européenne, la fleur se fane quelquefois à l’arrivée. Les déceptions suite à nos propositions allant vers un mieux, aux améliorations proposées d’une pratique, d’un gestuel, d’une technique, seraient nombreux mais à quoi bon les citer !
Le 31 Août ma mission se termine après trois mois dans des conditions qui ne vous laissent pas indemne. Mais ceux qui connaissent savent quel est mon degré d’engagement lors d’une mission : je donne tout ce que j’ai en souhaitant rester le Chef d’orchestre le temps de l’intervention. Lorsqu’on vous confie une mission, c’est pour une amélioration sur le terrain. Je repartirai de Tbilissi avec l’image du niveau ou la bulle n’est pas tout à fait au centre, pas tout à fait comme je l’aurais souhaitée !
Le dernier week-end j’ai pu « m’échapper », pour deux jours que j’ai passés hors de la ville, à cinq heures de route de Tbilissi dans la Province de Ra-cha au nord ouest, dans une région très montagneuses au village de Shardoneki dans le District d’Oni. Pour l’atteindre, deux cols à passer, de la neige sur les sommets ; les hivers doivent y être rudes. C’est de cette région qu’est originaire l’investisseur Géorgien Irakli. C’est là qu’il a réalisé un développement d’élevage, pour fournir dans un futur proche, ses propres magasins en viande de qualité « Bio ou naturel », avec en bout de chaine un abattoir moderne qui sera encore une « première » en Géorgie. Il y a là une ferme ultra moderne sur un terrain devenu plat grâce aux bulldozers, plantée sur le bord d’un torrent tumultueux, pouvant accueillir pour l’hiver environ 200 têtes de bétail. Vu la dureté du climat les bêtes seront 240 jours en étable ce qui constitue un énorme travail avec le foin venant des alpages qu’il faut entreposer pour les longs hivers. Durant la belle (mais courte) saison, les animaux sont dans les alpages avec les bergers où ont déjà été mises en place quatre fermes participative, de soixante têtes de bétail chacune. Selon la charte en vigueur, chaque animal a besoin d’un hectare de pâturage. Je suis donc monté en 4x4 avec l’équipe et le vétérinaire de l’entreprise pour visiter le cheptel, dans ce superbe endroit où la vie en montagne est rude.
Le soir j’ai été invité au mariage de l’un des employés, « le Boucher-Tueur » des animaux. Il était en tenue traditionnel Casaque, bottes, sorte de veston avec cartouchière insérée dans le costume.
Un rituel dans l’église orthodoxe assez particulier : comme il n’y a pas de bancs dans ces églises, chacun se presse autour du Pope pour brûler de l’encens en récitants des prières interminables. Le banquet lui aussi vaut ledétour : la table est surchargée de victuailles en tout genre, puis on en remet encore et encore, en empilant assiette sur assiette vide ou pleine. A la fin de la cérémonie il y est autant de victuailles qu’au début du repas…Le repas est entrecoupé de « santé pour les mariés » et il faut très souvent lever son verre, d’un vin blanc assez sec, servi à la cruche, et sans grand intérêt pour moi, fils de vigneron. Les mariés, fille et garçon d’honneur sont au fond de la salle sur une sorte d’estrade comme en démonstration, entouré de gâteaux hauts en couleurs, de coupes de fruits, de bouteilles en tous genres. J’ai apprécié d’avoir vécu cette expérience enrichissante.
Au retour comme prévu, je constate qu’il n’était pas inutile de laisser le personnel deux jours seul, afin de pouvoir expliquer ce qui aurait dû être fait et ce qui n’aurait pas dû être. Les employés ont compris ce qui les attendaient dans les jours à venir lorsqu’ils seraient livrés à leur seul instinct du métier, lorsqu’ils devront avoir l’œil et la main pour transformer et pour satisfaire le client, lorsque « Chef Jean » ne sera plus là pour vérifier.
Ils se rendent compte de la tâche qui les attend maintenant que le départ est proche. Ils savent qu’ils ne pourront plus se reposer sur mes conseils mainte fois donnés, qu’il faudra faire tout seul, avec toutes les recettes en main, appliquer ce qui à été enseigné et s’y tenir en sachant que la créativité viendra par la suite.
Voilà le récit de mon expérience et de mon vécu là-bas.
Maintenant, l’avion est là, direction Dubaï via l’Île Maurice puis la Réunion.
L’Afrique du Sud m’attend dés la fin de cette semaine de Septembre.
Merci de m’avoir lu et à bientôt pour vous raconter une prochaine mission.
Chef Jean Hue